mardi 31 mai 2011

Mom in DC - Des sangliers et de la pluie

Aujourd'hui, Maman et moi partons en vadrouille hors de DC sur les traces de la famille Washington ! Direction : Mount Vernon !
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Georgie, sa femme, Martha, et leurs deux petits-enfants...
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En effet, à environ une heure de DC, en enchaînant métro et bus, se trouve la plantation de George Washington. Forte de 200 hectares, surplombant magistralement le Potomac, l'ancienne maison du premier Président des USA peut se targuer d'attirer chaque année le deuxième plus grand nombre de visiteurs après la Maison Blanche.
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Ce grand monsieur de plus d'1m90 que Maman connut assez intimement dans sa jeunesse pour se permettre de lui tripoter le bedon, s'installa à Mount Vernon à l'adolescence. C'était alors la résidence de son demi-frère aîné, Lawrence. Une fois celui-ci décédé, en 1754, Georgie rachète la propriété à sa demi-belle-soeur (j'innove, j'innove...). Il a tout juste mon âge quand il entre en possession de cette grande plantation. Pendant toute la durée de la guerre d'Indépendance, en sa qualité de commandant en chef des forces continentales, il ne s'y rend plus beaucoup. Mais de 1883 à 1889, il revient y travailler à plein temps. Il acquiert toutes les terres avoisinantes, de sorte qu'en quelques années à peine, l'exploitation passe de 200 à 3207 hectares ! Quittant à nouveau Mount Vernon pendant ses années de présidence, de 1789 à 1797, il n'y reviendra que pour passer une courte retraite et mourir (je sais, c'est joyeux !).
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Chose originale : pendant la guerre de Sécession, la propriété fut considérée par les deux camps comme un terrain neutre. Symbole de l'unité du pays pour obtenir l'indépendance, personne ne se serait permis d'y toucher, de sorte que la propriété a gardé pas mal de choses d'origine.
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Même si aujourd'hui, la ferme n'est plus exploitée et qu'un centre des visiteurs et tout le tralala ont été construits, les paysagistes ont pris garde à ne pas dénaturer le charmant côté pastoral des lieux... Petit tour du proprio en images !
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La maison vue de face, côté jardin / public (le côté fleuve étant réservé à la famille)...
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La serre (au centre), dans laquelle George Washington se livrait à des expérimentations avec des graines pour ensuite les réintroduire dans sa propriété. Les soubassements de chaque côté correspondaient aux maisons des esclaves.
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Le côté de la grande maison dont la grande fenêtre donne sur la salle à manger.
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Détail amusant : l'intérieur de cette salle à manger est d'un vert turquoise pétant, car au XVIII° siècle, les pigments verts étaient les plus chers sur le marché des couleurs. Aussi, avoir une pièce de cette couleur chez soi permettrait de démontrer à ses visiteurs qu'on était très fortuné. En des termes plus modernes, Georgie était donc l'équivalent de notre "bling-bling Sarko" => "il se la pétait grave !".
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La maison à trois étages est surmontée d'un joli petit clocheton vitré d'où l'on pouvait voir loin sur le Potomac...
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De chaque côté de la maison principale, on a deux espèces de coursives ainsi couvertes, permettant aux invités de passer de leur petite chambre d'hôtes au hall d'entrée du maître de maison sans se faire mouiller.
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Voici la vue de derrière la maison. Le jour où j'y étais, il faisait un temps de chien, donc ce n'est pas fou fou, mais en été, quand il faisait très chaud et que le ciel était dégagé, la terrasse donnant sur le fleuve (très large à cet endroit-là) devait être plutôt sympa...
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Et comme il ne s'agissait pas d'un hôtel particulier mais d'une véritable ferme, le domaine comporte aussi un grand nombre de petites maisonnettes en pierre dans lesquelles on stockait le grain, on logeait le contremaître et l'intendance, on ferrait les chevaux, on tannait du cuir, etc.
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Pour le plaisir des petits enfants, les enclos à l'ancienne sont encore habités de quelques ovidés, bovidés, sangliers, etc.
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Parce qu'on n'avait pas le droit de prendre des photos à l'intérieur de la grande maison, mais que c'était quand même rudement joli, je vous mets ci-dessous 3 photos d'une maquette géante très très bien faite et assez fidèle à la réalité, située dans le centre des visiteurs.
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La pièce en haut est une représentation de la chambre de Georgie et Martha. Dans la réalité, cette pièce était magnifique, de très bon goût et étonnamment moderne. Ironiquement, c'est la seule pièce de la maison que Georgie avait autorisé Martha à décorer entièrement à sa guise... Comme quoi ! La pièce était très grande et très lumineuse, parquetée, à la fois très blanche (par les murs et le plafond) et très colorée (avec le grand tapis et le tissu des baldaquins). C'est là que Georgie rendit son dernier soupir, provoquant la migration immédiate et définitive de Martha vers l'une des chambres plus petites sous les combles, tant sa douleur était grande...
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Un autre petit salon, une autre chambre... Bien que paraissant assez modeste d'extérieur, la maison de Washington était en fait savamment agencée et comportait de fait un nombre de pièces digne d'un petit château ! Pas loin d'une dizaine de chambres au total...
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Pour finir sur la maison, j'ajouterai deux p'tits trucs rigolos encore.
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1) Chose surprenante pour l'époque, la maison comporte un réseau d'aération très sophistiqué. L'été étant extrêmement chaud en Virginie, Washington avait fait doter sa maison d'un système de tuyaux, d'évents et de petits volets pour tenter de l'aérer en période de grosses chaleurs.
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2) Et encore une histoire de clim' : dans le bureau de Georgie, on se rend compte que son fauteuil de bureau (en bois tout ce qu'il y a de plus classique pour l'époque) est surmonté d'une espèce de carré de tissu un peu rigide pendu sur une barre en bois, et terminé aux pieds par deux pédales en bois (comme sur l'harmonium). Tout en travaillant à sa table, il avait ainsi la possibilité de pédaler, de sorte que "l'éventail" au-dessus de sa tête se mette en mouvement et lui procure un petit vent agréable au niveau de la tête.
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Quand à la propriété en elle-même, aux champs tout autour des logis, ils rappellent des tableaux de scènes pastorales anglaises... C'est peut-être à cause de la pluie de ce jour-là...
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La visite étant terminée, nous reprenons ensuite le bus et le métro pour quelques stations à peine, direction maintenant : Alexandria. Rien à voir avec les papillons de ma jeunesse ! Avec ses trottoirs en briques et ses vieilles maisons datant des premiers colons, Alexandria est une petite ville toute mignonne, rappelant énormément Georgetown.
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Egalement sise sur les bords du Potomac, la ville prospéra à partir du XVII° siècle, du fait de sa position stratégique pour expédier par bateau le tabac et le grain produits en Virginie vers l'Europe, ainsi que pour le commerce d'esclaves.
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Au moment de la guerre de Sécession, le port revêtit un intérêt particulier pour les deux camps, étant donné qu'il était à seulement 160km de la frontière entre les deux. L'Union s'en saisit, fortifia la ville, et des centaines de milliers de soldats y déferlèrent pendant 4 ans. D'interminables files de blessés en provenance du sud y débarquèrent. Les églises, les hôtels particuliers, les entrepôts des commerçants : tous furent réquisitionnés par les autorités militaires et hospitalières. A la fin de la guerre, soudainement vidée de ses habitants, la ville ne se remit jamais vraiment et fut condamnée à devenir une très jolie ville provinciale attirant des touristes en été pour ses fruits de mer et sa promenade le long des quais.
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Horreur de la ville, sur une colline : un grand mémorial maçonnique !
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En dehors de ça et malgré la pluie battante et le ciel gris-blanc, un régal que de se promener dans ces jolies rues et de finir par un crab cake divin (LA spécialité de la baie de Chesapeake et des rives du Potomac : une espèce de petit cake très fin au crabe et à l'oeuf...) dans un restaurant bien au chaud.
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De vieilles maisons typiques d'Alexandria.
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Le petit détail architectural qui tue :
Notez sur la façade latérale de la maison de gauche la présence d'étoiles. On les appelle des "wall washers" ou "wall anchors" en anglais. Elles ont une fonction structurelle, puisqu'au bout sont attachées des tiges métalliques, qui traversent la maison de part en part (il y a les mêmes étoiles sur la façade latérale de droite qu'on ne voit pas), entre deux étages (cachées entre le plafond du rez-de-chaussée et le plancher du second par exemple). Elles sont censées servir d'armatures renforçant la maison et évitant que les murs ne bougent au fil du temps.
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Une vieille vieille vieille maisonnette digne de "Boucle d'Or et les Trois Ours".
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Ville proprette, soignée, fleurie...
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Truc assez rigolo propre aux vieilles maisons riches ici : la présence de grattoirs en métal travaillé. Quand on rentrait chez soi et qu'on avait parcouru des ruelles non pavées ou bien arpenté ses terres, on pouvait se gratter les semelles sur ces objets, sans se baisser, et ainsi éviter du ménage aux domestiques...
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Et voilà ! La nuit tombe sur Alexandria comme sur cet article...

mercredi 25 mai 2011

Mom in DC - Des cours et du crumble

Aujourd'hui, pas grand-chose de passionnant pour ma part. J'ai pas mal séché les cours pour passer du temps avec Maman depuis son arrivée, mais cet après-midi, je ne peux pas y couper. On ne va donc faire que peu de choses ensemble...
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D'abord, le matin, je lui montre le quartier de Dupont Circle. Son côté résidentiel - plus "classes moyennes" que Georgetown, et donc un peu moins surfait, un peu moins guindé - en fait un quartier très animé où il fait bon traîner. Des restos, des bars, des cafés, des snacks, des petites boutiques, des clubs, des consulats... En outre, certaines maisons n'ont rien à envier à celles de Georgetown, tant elles sont belles et/ou cossues.
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Après une salade faite sur mesure dans l'un des ces bars à salades ultra-hygiéniques (avec de l'inox du sol au plafond) qui pullulent dans les grandes villes américaines ("Chop'n T" mon amour !), je laisse Maman à sa visite de la Phillips Collection pendant que je m'en vais retrouver des salles de cours plus hostiles...
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Succession, Wassily Kandinsky, 1935.
(C'est pas souvent que je trouve Kandinsky à mon goût alors là, faut que j'immortalise ce tableau vu il y a quelques mois pour moi, et que Maman m'a remis en tête...)
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Une fois sortie du musée, Maman se promène sans moi, entre U Street et Dupont Circle... Comme elle fait du tourisme, elle en profite pour faire des photos du quartier que je n'ai jamais eu l'occasion de faire... alors je lui pique !
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Ci-dessus, un grand temple maçonnique comme on ne pourrait pas en imaginer en France...
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Ci-dessus, une grande église de scientologie comme on n'en imagine pas NON PLUS en France !
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Voili voilou. Après mes cours, Marine et moi retrouvons Maman chez Kramer's, pour y déguster une dernière fois un gros crumble, en guise de goûter, voire de dîner tant c'est copieux ! On se balade au milieu des livres de ce café-librairie que j'adore. Et voilà grosso modo pour aujourd'hui !

Mom in DC - Des tombes et des manoirs

Aujourd'hui, grand soleil ! C'est le temps idéal pour passer la journée entièrement dehors ! Direction Arlington d'abord ! Je veux montrer à Maman le cimetière national, si arboré, vallonné, fleuri et paisible que l'on se croirait dans un grand parc... On prend donc le métro pour traverser le Potomac.

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En arrivant, on voit toute une troupe de Harley Davidson, parées de drapeaux américains. Elles pétaradent en entrant dans le cimetière. Ce sont très probablement des vétérans de la guerre du Viêt-Nam venus enterrer un des leurs.

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A cette saison, le cimetière est encore plus beau que la dernière fois... Les cerisiers du Japon, les arbres de Judée et les magnolias sont partout !
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Le couple Kennedy est enterré en toute sobriété. Lors de l'assassinat de JFK en 1963, Jackie y alluma une flamme éternelle qui brille sans discontinuité depuis, même sous la pluie ou la neige.

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Quand on monte sur les hauteurs de la colline principale d'Arlington, on a une vue extraordinaire sur Washington. On est pile dans le prolongement du Arlington Memorial Bridge et du Lincoln Memorial. On aperçoit les toits, dômes, tourelles, etc. de tous les bâtiments caractéristiques de la capitale.

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Et parmi les centaines de milliers de personnes enterrées à Arlington, celui qui a encore le plus de veine de surplomber ainsi la ville, c'est Pierre L'Enfant. Normal, c'est l'architecte franco-américain qui fut chargé de dessiner et de donner vie à Washington... De sa tombe, il peut donc contempler son oeuvre pour l'éternité !

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Autre curiosité en haut de la colline : Arlington House. Il s'agit de la maison du général sudiste Robert Lee (les cruciverbistes le reconnaîtront !). Oui, parce qu'il faut savoir qu'avant la guerre de Sécession, la Virginie était considérée comme appartenant au "Sud", aux Confédérés donc. Lee était marié à l'une des petites filles de George Washington, et comme lui, il vivait de ses plantations et n'avait rien contre l'esclavage. Défaite assez tôt en Virginie, l'armée des Confédérés a dû ensuite reculer vers le sud, tandis que l'armée de l'Union s'appropriait la maison de Lee pour en faire ses quartiers généraux.

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Une scène que Monet aurait pu peindre s'il était encore en vie : des petites filles jouant dans le potager de feu Madame Robert Lee...

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Par ailleurs, la guerre de Sécession, si l'on nous en dit peu de choses en France, fut en réalité une véritable boucherie aux Etats-Unis. Les spécialistes estiment ses dégâts à 625 000 morts. A la fin de la guerre, la plupart des cadavres identifiés furent enterrés à Arlington, avec les honneurs pour ceux de l'Union, en silence pour ceux de la Confédération.

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Ci-dessous, une espèce d'immense tombe regroupant les os en vrac de 2111 cadavres non identifiés. C'est assez sinistre...

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Et puis en dehors de la guerre de Sécession, Arlington c'est au total 290 000 tombes de soldats réparties sur 247 hectares. Pour être enterré dans "le lieu le plus sacré des Etats-Unis" - comme c'est indiqué à l'entrée -, il faut soit mourir en mission, soit être/avoir été décoré d'une médaille militaire de haut rang. Et comme je vous l'avais déjà dit la première fois, le cimetière continue de se remplir, puisque la section 60 continue d'accueillir les soldats morts en Irak et en Afghanistan.

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Quand les soldats décédés ont le droit aux honneurs, c'est-à-dire aux 21 coups de canon (me demandez pas pourquoi 21, j'en sais rien !), au cercueil enveloppé dans un grand drapeau américain, etc. c'est dans l'espèce de théâtre néoclassique ci-dessous que ça se passe.

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Enfin, comme dans tout monument de guerre qui se respecte, le soldat inconnu n'est pas oublié. Surplombant la capitale là encore, les soldats inconnus des deux guerres mondiales et de la guerre de Corée possèdent aussi chacun leur monument. Ceux-ci sont gardés 24 heures sur 24 par des soldats tirés à quatre épingles, et la relève de la garde est une attraction.

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Sur cette dernière photo plus poétique d'un pitit oiseau sur une tombe, clap de fin sur Arlington !

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Maman et moi décidons d'aller à Georgetown à pied. On traverse donc le Potomac et on longe le fleuve jusque là-bas. C'est l'occasion de voir le Lincoln Memorial de derrière...

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... ainsi que l'université de Georgetown, et notre modeste "front de mer", malheureusement embourbé par une crue du Potomac, suite aux pluies diluviennes du week-end précédent.

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Une fois arrivées à Georgetown, on fait une petite pause rafraîchissante chez Snap, ce petit café que j'aime bien parce qu'il propose de vraies crêpes à la française et des bubble teas, ces thés glacés servis avec de petites boules de tapioca au fond. Et puis on reprend la marche, direction les rues résidentielles peu touristiques mais diablement belles !

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Je porte un nouveau regard sur ce quartier que j'ai pourtant arpenté des dizaines de fois dans l'année. Je ne sais pas si c'est le temps radieux qui sublime les couleurs des façades et fait briller la brique rouge, ou bien si c'est le retour des feuilles et des fleurs sur les arbres, mais je n'ai jamais trouvé Georgetown aussi joli que ce jour-là. Malgré son petit côté posh / rupin, je suis baba ! Je prête attention aux portes toutes différentes les unes des autres, so British...
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... et je remarque une porte au 1er étage qui donne sur le vide, ce qui me fait penser à Numérobis ("J'anticipe ! Si vous voulez faire un deuxième étage, paf, vous pouvez parce qu'il y a déjà une porte pour y accéder").

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Fin